MÉMOIRE DE LA PROSPÉRITÉ DURABLE

Le présent mémoire expose le point de vue de La Prospérité durable (LPD) concernant le budget fédéral en se fondant sur son analyse des mesures et des politiques figurant dans le budget fédéral de 2011. L’analyse et les recommandations du mémoire reposent sur certaines hypothèses clés de La Prospérité durable qui sont mentionnées ci-dessous. Ce mémoire est une version abrégée d’un mémoire plus long que La Prospérité durable espère remettre au Comité des finances lors de la tenue de ses audiences.

Voici le plan du mémoire :

1.    Renseignements généraux sur La Prospérité durable

2.    Hypothèses clés sur lesquelles repose le mémoire

3.    Conclusions concernant le Budget de 2011

4.    Recommandations concernant le Budget de 2012

LPD fait part de trois recommandations concernant le Budget de 2012 (on trouvera ci-dessous de plus amples explications) :

i.              Le Budget de 2012 devrait utiliser le concept de « capital national » comme cadre pour évaluer et expliquer la richesse et la prospérité nationales.

ii.            Le Budget de 2012 devrait comporter un élément particulier et structuré concernant l’économie verte.

iii.           Le Budget de 2012 devrait prévoir une analyse et des explications plus approfondies sur le choix des instruments.

1. Renseignements généraux sur La Prospérité durable

La Prospérité durable est un organisme de recherche indépendant établi à l’Université d’Ottawa. Son mandat est de promouvoir le développement d’une économie verte au Canada en mettant l’accent sur le rôle que les politiques fondées sur le marché peuvent jouer dans la production de résultats économiques et environnementaux positifs.

Notre approche revêt un caractère particulier. Nous estimons que les innovations en matière de politique et de marché favorables à une économie canadienne plus forte, plus écologique et plus concurrentielle exigent un nouveau savoir et un nouveau dialogue public. L’approche de LPD consiste à promouvoir l’un et l’autre au moyen des activités suivantes :  

·         Dans la recherche de pointe : grâce à son réseau d’universitaires, LPD dirige la recherche portant sur l’impact des politiques économiques sur notre environnement.

·         Grâce à des conversations innovatrices : nous réunissons des gens issus de milieux diversifiés afin de former une vision durable et prospère du Canada.

·         Avec des solutions brillantes : nous lançons et nous défendons des initiatives tournées vers l’avenir afin d’orienter la politique publique vers une économie durable.

Nous mobilisons les découvertes les plus récentes pour promouvoir l’innovation en matière de politique et de marché, et ce, en vue d’assurer le développement d’une économie plus écologique et plus concurrentielle. Parallèlement, LPD contribue activement à l’élaboration de solutions concrètes en rassemblant des décideurs des secteurs privé et public et des chercheurs en vue de concevoir et de mettre en œuvre des politiques et des programmes innovateurs. Notre recherche porte actuellement sur quatre domaines : les économies à faibles émissions de carbone, les collectivités durables, les marchés des écosystèmes et les enjeux économiques globaux.

2. Hypothèses clés

Notre analyse du Budget de 2011 et nos recommandations concernant le Budget de 2012 reposent sur les hypothèses suivantes :

A.   Le budget est l’énoncé annuel de politique le plus important du gouvernement fédéral. Comme il expose les grandes lignes des initiatives fédérales en matière de dépenses, de fiscalité et de réglementation, il exprime de la manière la plus directe les priorités politiques de l’année. En outre, grâce au lien qu’il établit entre les mesures budgétaires et l’économie canadienne, il explique le rapport entre les politiques gouvernementales et la performance de l’économie. Il en résulte un cadre pour évaluer le rendement des politiques gouvernementales et, au bout du compte, la responsabilité pour le succès des politiques.

B.   L’établissement d’une économie «verte » est un intérêt national fondamental et permanent et devrait être une des principales priorités du gouvernement fédéral. En effet, non seulement la préservation d’un environnement sain a-t-elle une incidence immédiate sur nos aspirations économiques et sociales, mais les marchés internationaux – dont le Canada est tellement tributaire pour sa prospérité – exigent de plus en plus des biens et des services qui sont produits et offerts de manière durable.

C.   L’innovation et la productivité sont, et doivent demeurer, des déterminants importants de la politique économique nationale du Canada. Elles représentent des facteurs importants pour évaluer l’incidence du budget, et ce, tant du point des conséquences « micro » de ses mesures particulières que de celui des conséquences « macro » de ses orientations générales.

D.   L’innovation et la productivité devraient faire partie intégrante tout autant de la politique environnementale du Canada que de sa politique économique. Et, inversement, la poursuite de la durabilité de l’environnement devrait faire partie intégrante de la politique économique du Canada. Compte tenu du poids des ressources naturelles dans les perspectives économiques du Canada, les politiques qui encouragent une utilisation plus efficace et productive de ces ressources peuvent produire des résultats économiques et environnementaux positifs et contribuent donc au développement d’une économie verte au Canada.

3. Conclusions concernant le Budget de 2011

Dans la préparation du présent mémoire, nous avons centré nos efforts sur l’évaluation de la démarche générale du gouvernement concernant le développement d’une économie verte au Canada. Nous avons défini « économie verte » dans un sens très large qui permet de tenir compte d’une part assez considérable des mesures figurant dans le budget. Toutefois, notre analyse, loin de s’attarder au niveau général de soutien prévu dans le budget, met l’accent plutôt sur une évaluation de l’efficacité, de l’efficience et du rôle final du budget dans la promotion d’une économie verte au Canada.

Conclusion N1   Le budget de 2011 doit être considéré comme un budget de « maintien de la visée » en ce qui concerne l’économie verte et l’ensemble des politiques environnementales. Il affecte des ressources à d’importantes initiatives environnementales, mais les principales affectations de fonds ont pour objet le maintien des programmes déjà en vigueur. Il ne comporte pas de nouvelles initiatives majeures.  Bref, il ne comporte pas d’orientation gouvernementale nouvelle ou émergente concernant l’économie verte ou les questions environnementales. 

Conclusion No 2  Les mesures budgétaires portant sur l’économie verte ne s’inscrivent pas dans un cadre ou une stratégie d’ensemble. Il s’agit plutôt de mesures ponctuelles destinées à répondre à des besoins particuliers. De plus, les documents budgétaires offrent très peu de renseignements sur les objectifs ou les résultats escomptés de certaines initiatives au titre de l’économie verte (notamment l’appui aux mesures de réglementation).

À défaut d’une stratégie globale ou d’objectifs déterminés concernant les diverses mesures stratégiques, il est difficile d’évaluer l’incidence que celles-ci auront sur la promotion de l’innovation, de la productivité et de la durabilité (qui, selon LPD, et comme mentionné ci-dessus, devraient être les critères d’efficacité clés d’une politique d’économie verte). Cette difficulté se répercute aussi sur l’avenir puisqu’elle a pour conséquence que toute évaluation ultérieure de l’efficacité des mesures sera forcément incertaine, ce qui soulève la question de la responsabilisation.

Conclusion No 3   Le Budget de 2011 privilégie les dépenses et les mesures réglementaires et accorde relativement peu d’importance aux mesures fiscales. Notre analyse indique que, sur les nouveaux engagements budgétaires de 1,96 milliard de dollars relatifs à l’environnement, seulement 48 millions de dollars (soit 2,2 % du total) correspondent à des mesures fiscales1. L’analyse du choix des instruments de politique, notamment ceux utilisés pour les politiques environnementales, donne à penser que les mesures fiscales peuvent avoir des niveaux d’efficacité comparables à ceux des instruments réglementaire, mais avec un degré d’efficience plus élevé. Autrement dit, un instrument fiscal peut atteindre le même objectif à un coût moindre qu’une mesure réglementaire. En outre, la recherche indique que les outils d’intervention fondés sur la fiscalité ou la tarification, contrairement aux instruments réglementaires, comportent une incitation constante à l’innovation.  

Bien entendu, il s’agit là d’une conclusion générale et théorique (bien que fondée sur l’expérience) et, par conséquent, LPD ne suggère pas que les mesures réglementaires dont fait état le budget soient remplacées par des instruments fiscaux. Mais les documents budgétaires ne proposent aucune explication concernant le choix des instruments. Plus précisément, ils n’expliquent pas pourquoi on a retenu des mesures réglementaires plutôt que fiscales. À défaut d’une telle explication, il est difficile d’évaluer l’efficacité relative des instruments dans la promotion de l’innovation et de la productivité.

4. Recommandations concernant le budget de 2012

Comme LPD estime que le budget est le principal énoncé de politiques du gouvernement, et compte tenu de notre évaluation du Budget de 2011 en tant qu’indicateur de la priorité que le gouvernement accorde à l’économie verte, nous vous faisons part des recommandations suivantes concernant le Budget de 2012 :

1.    Le Budget de 2012 devrait utiliser le concept de « capital national » comme cadre pour évaluer et expliquer la richesse et la prospérité nationales.

La Norvège, un pays qui ressemble beaucoup au Canada, a fait œuvre de pionnier en adoptant un cadre en vertu duquel son économie est décomposée en diverses formes de capital (humain, naturel, construit, financier, etc.). Par suite d’un engagement à accroître son capital national d’une année à l’autre, la décomposition permet aux décideurs et au public de comprendre comment les diverses formes de capital augmentent et diminuent, et comment la croissance globale du capital national aide à assurer la prospérité continue (et à long terme) du pays. Étant donné l’importance de l’industrie norvégienne du pétrole dans son économie nationale, le cadre comporte également des indications claires sur la façon dont le capital naturel (le pétrole et le gaz) est transformé en d’autres formes de capital et contribue à la richesse à long terme du pays2.

2.    Le Budget de 2012 devrait comporter un élément particulier et structuré concernant l’économie verte.

L’approche fragmentaire et ponctuelle sur laquelle reposent les engagements budgétaires en matière d’environnement devrait être remplacée par une approche plus stratégique axée sur le développement d’une économie verte au Canada et privilégiant l’innovation et la productivité fondées sur la durabilité. Cette approche reposerait sur un énoncé clair des résultats et des objectifs de politique afférents à l’économie verte et comporterait une analyse et une explication des instruments de politique – dépenses, fiscalité et réglementation – devant être utilisées pour parvenir à ces résultats et ces objectifs. À titre d’exemple, dans son analyse générale de la performance de l’économie canadienne (que l’on trouve généralement dans le premier chapitre des documents budgétaires), le Budget de 2012 devrait proposer un bilan des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

Une telle approche comporterait de nombreux avantages, notamment en augmentant la capacité des Canadiens et de leurs représentants élus de comprendre comment le budget contribue à la réalisation des objectifs du Canada concernant l’émission de gaz à effet de serre. On se trouverait ainsi à accroître la responsabilisation du gouvernement du Canada dans cet important domaine.

3.    Le Budget de 2012 devrait prévoir une analyse et des explications plus approfondies sur le choix des instruments.

LPD croit que, de manière générale, un recours plus grand à des instruments fiscaux (et fondés sur le fonctionnement du marché) produirait des résultats à des coûts économiques moindres que ceux des mesures réglementaires tout en encourageant l’innovation et la productivité. 

Il est difficile de comprendre les choix particuliers d’instrument de politique effectués par les gouvernements – et dont témoignent les budgets – en l’absence d’une explication des motifs ayant présidé à ces choix. C’est pourquoi, sans porter de jugement sur les choix effectués par le gouvernement, LPD affirme qu’une plus grande transparence concernant le choix des instruments utilisés dans la poursuite d’objectifs particuliers permettrait une meilleure compréhension et une meilleure évaluation de l’incidence des mesures.

ANNEXE A

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ANNEXE B

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1      On trouvera à l’appendice A une liste de ces engagements tels qu’ils ont été déterminés par LPD. Ici encore, nous estimons que les mesures figurant dans notre évaluation des mesures afférentes à « l’économie verte » correspondent à une conception très large de ces activités. Il ne conviendrait donc pas d’attribuer à cet ensemble très large d’engagements des conclusions concernant la priorité générale accordée à l’économie verte dans le budget de 2011.

2      On trouvera à l’appendice B un graphique indiquant comment les diverses formes de capital sont décomposées et comment elles ont évolué au fil des ans.